La fin du monde ; et après ?
C’est la fin du monde ! Nous allons tous mourir ! À ce qu’il paraît… Rappelons-nous de l’arnaque qu’avait été l’apocalypse en l’an 2000. Le scribe des enfers avait d’ailleurs raconté les problèmes rencontrés par Satan lui-même.
Il y a longtemps que je n’avais pas écrit ici. J’ai beaucoup travaillé sur le reste du réseau Orpheo Mundi et je me suis consacré à L’échelle de Jacob. Comme vous le voyez, je ne suis pas encore mort, il faudra attendre demain comme tout le monde. Toutefois, jouons le jeu. Ce serait alors mon dernier article. Quel bilan puis-je faire en cette veille d’apocalypse ?
Mourir le sourire aux lèvres.
Une phrase m’a fait une très forte impression dans le livre « Dune » de Frank Herbert :
« Ne côtoie que des gens que tu voudrais avoir à tes côtés le jour de ta mort »
Cette phrase m’a accompagné depuis. Je vis ma vie en suivant cet enseignement donné au personnage de Paul Atréide. Lorsque je lui en ai parlé, une amie me disait que c’était une belle ambition mais que cela était impossible dans le monde du travail. Oui et non. Certes, dans un cadre professionnel nous n’avons pas le choix, du moins celui-ci est beaucoup plus restreint. Je vais prêcher par l’exemple :
Je ne cache pas ma bisexualité, ce qui n’est pas toujours aisé là où je vis à Saint–Denis et où je travaille à Sarcelles. Je ne compte plus le nombre de fois où on m’a promis l’enfer pour mon mode de vie, que je suis un pervers etc. Cela dit, il y a une satisfaction finale à tout ceci : faire évoluer les consciences. Cela a eu un impact auprès de certain(e)s en les débarrassant des clichés portés par l’ignorance. J’ai aussi beaucoup appris d’eux en retour. Alors oui, Il est difficile de toujours être avec des personnes que l’on voudrait à ses côtés le jour de sa mort. On peut toutefois faire en sorte que ça le devienne et qu’on le devienne aussi pour eux en restant fidèles à ce que nous sommes.
Il est évident que ce concept est tout aussi présent dans ma vie privée. Je fais référence ici à ma vie physique mais aussi à celle numérique. Cette dernière a été émaillée de belles rencontres dont certaines se sont concrétisées devant un verre. Je fais notamment référence aux membres d’Ipagination, comme Aliza rencontrée lors de sa venue en France. Que dire de toutes ces rencontres avec les autres membres de ce réseau pour le premier anniversaire ? C’est la fin du monde ? Ok mais je ne mourrais pas avant que Yoxigen soit notre président en 2017 ! La fin du monde ne saurait m’empêcher non plus de me rendre un jour au Maroc pour voir mes deux Déesses Lumière de Lune et Aphrodite, rencontrées dans l’univers de WordPress.
Vie professionnelle, vie privée, vie numérique, il est il important d’être bien entouré pour qu’au moment où tout se termine, on puisse faire le bilan de sa vie dans le regard de ceux qui nous entourent.
Le paradis sur terre
Au diable les eschatologues ! Toutes les religions promettent le paradis ou l’enfer. Mais tel que je comprends les choses avec mon esprit pervers, il s’agit plus de mises en garde sur comment mener sa vie pour être en paix au moment de mourir que de se demander si on vivra l’éternité entouré de flammes. A-t-on des regrets au moment de son dernier souffle ? Est-on en paix ? Cela me semble plus pertinent que d’ergoter sur un éventuel au-delà que personne ne connaît. Je vous suggère d’ailleurs la lecture de cet article d’Amine Venezia sur la non-existence de l’enfer. Et si on considère que le paradis existe, le mérite-t-on si on n’a rien fait pour faire de ce monde, ici bas, un paradis ? Toutes ces personnes qui paniquent pour une éventuelle fin du monde, qu’ont-elles fait en ce sens ? Si certaines personnes que nous avons pu voir dans des reportages sont loufoques, elles sont plutôt à plaindre. Il y a beaucoup de choses que je n’ai pas faites, beaucoup de regrets et de doute, mais au moins j’aurais essayé. Que la fin arrive, si je mets mes satisfactions et mes hontes en balance, je serais tout de même relativement souriant. Au lieu de craindre la mort, craignons des vies que nous n’avons pas assez menées.
Mon épitaphe
Tant qu’à parler de mort, autant aller jusqu’au bout. J’ai choisi il y a très longtemps mon épitaphe. Je désire que soit marqué :
« Il fut une obsidienne »
C’est un peu grandiloquent, je l’admets ; autant que ma sépulture me ressemble. Pour expliquer : l’obsidienne est du verre volcanique noir. Il servait à la confection de flèches, de bijoux ou de dagues de sacrifice. Ce verre noir est si naturellement poli qu’il semble par moments briller alors qu’il ne fait que réfléchir la lumière. Ainsi je signais mes premiers textes du pseudo « Obsidienne » ; je me reconnaissais dans cette description. Cette même amie qui disait que c’était impossible de suivre l’enseignement de « Dune » avait noté avec malice : « Mais l’obsidienne c’est du verre, donc ça se brise » (discuter avec une géologue n’est pas toujours une bonne idée) Oui, et c’est aussi la raison de mon affect pour ceci. Cela dit, il faudra attendre encore un peu, même s’il est vrai que demain, ce 21 décembre, ce sera la fin du monde pour certains.
L’injustice du 11 septembre
Dans le cadre de mon travail, je suis amené à enregistrer des décès. Si vous souhaitez connaître mon emploi, il faut pour cela lire mon interview sur le site de 4h18. En septembre, on me disait parfois : « je viens annoncer le décès de telle personne qui est morte le 11 septembre ». Certes, c’est des années après les attentats, mais je me suis souvent demandé comment vivaient les proches de ceux qui sont morts le même jour de cette année funeste. Les victimes dans les tours et dans les avions, le monde entier a pensé à eux ; mais ceux qui sont morts ailleurs dans le monde ? La question classique de « que faisais-tu ce jour-là ? » est souvent posée depuis. Certains peuvent répondre qu’un de leurs proches est mort ce jour là. Pour eux, c’était la fin du monde. Cette fin du monde personnelle leur a peut-être été volée par un évènement ayant changé la face du monde. Et bien demain ce sera la même. Le 21 décembre 2012, des gens mourront comme tous les jours, et pour leurs proches ce sera l’apocalypse. Pour une mère qui voit ses enfants mourir de malnutrition les uns après les autres, pour les familles de ces enfants qui sautent sur des mines, c’est la fin du monde chaque jour. Sans aller jusque dans ces extrêmes, combien recevront un coup de fil commençant par « J’ai une mauvaise nouvelle… »
C’est bien tout ça, mais en conclusion : On meurt ou pas demain ?
Demain, je ne pense pas, mais un jour certainement. Comme vous le voyez, je rends des jugements audacieux.
À la question existentielle « pourquoi nous sommes là », j’aimerais répondre que c’est parce que telle est ma volonté. De crainte de finir sur le bucher de ma vanité, je m’en abstiendrai. Ma seule conclusion est que cette question est en quelque sorte la réponse. Nous sommes là pour trouver la réponse et transmettre les bribes de ce que nous avons trouvé aux générations futures. Nos vies en elles-mêmes sont des éléments de cette réponse. Nos joies, nos peines, chaque souffle nous en approche. Ne dit-on pas que ce n’est pas l’objectif qui compte mais le chemin parcouru ? Poussons jusqu’à l’impératif catégorique kantien que j’avais déjà cité : agissons de telle sorte que nos actes deviennent un dogme pour l’ensemble. Il ne s’agit pas forcement de transmettre de grandes pensées philosophiques ; simplement nos expériences de vies. Soyons, existons, c’est ainsi que nous transmettons.
Nos vies sont fragiles. Pour moi nous sommes les compositions délicates d’un ikebana, l’art floral japonais. Un coup de vent suffit à nous disperser. Nous naviguons alors à travers le monde et dispersons notre pollen. Nous bouffons les pissenlits par la racine, mais nous sommes aussi la source d’autres racines. Soyons fier de ce que nous avons à léguer.
Qu’importe si c’est la fin du monde demain ou non si on est incapable de s’occuper du présent. Je dis ça, si ça se trouve je ferais moins le malin demain.
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