Le pendule de Foucault, Umberto Eco

Il existe pour moi trois types de romans ésotériques :

1.« Le Da Vinci code », sous-culture de masse qui m’agace. Je n’ai rien contre ce roman qui a pour intérêt d’avoir poussé des gens à lire, mais que chaque lecteur se prenne pour un grand théologien suite à cette lecture me navre. Une pensée pour cet ami travaillant au Louvre qui s’est fait enguirlander parce qu’il ne savait pas où était le Graal…
2.« L’ange à la fenêtre de l’Occident » de Gustav Meyrinck dont je parlerai ultérieurement. Je dirais simplement que j’aurais voulu trouver un si beau titre pour une œuvre.
3.« Le pendule de Foucault » d’Umberto Eco. C’est de ce chef-d’œuvre dont je vais vous parler (mais vu le titre vous vous en doutiez)

Comment vous présenter le livre sans en déflorer les merveilles inattendues ? Trois jeunes gens travaillent dans une maison d’édition ésotérique. Celle-ci propose deux gammes :
• Une pertinente pour les ouvrages sérieux
• Une poubelle où ils publient les auteurs farfelus convaincus d’avoir trouvé les grands secrets de ce monde.

Vous imaginez bien qu’ils reçoivent plus de manuscrits faisant partie de la seconde catégorie que de la première. Conséquence de cette situation : ces jeunes gens s’ennuient. Pour briser ces insupportables bâillements, ils se livrent à un petit jeu sans conséquence. Partant du procès des templiers, ils imaginent un complot revanchard de ces derniers pour conquérir le monde. On ne peut qu’être admiratif de leur érudition et par extension de celle d’Umberto Eco. On est très loin d’un Da Vinci Code qui ne reposait que sur une pop-culture erronée et agitant des spectres sans fondement. Ici les faits historiques sont étayés et déformés par ces personnages en quête d’excitation. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, même s’il est plaisant de suivre l’évolution de leur complot. En parallèle, des choses étranges arrivent autour d’eux. Des personnes singulières les approchent et semblent très intéressées par leurs délires… à vous de découvrir la suite.

Pendule de Foucault du Panthéon de Paris (Source : Wikimedia common)
Pendule de Foucault du Panthéon de Paris
(Source : Wikimedia common)

Ce livre est extraordinaire par son histoire mais aussi par son style. Chaque phrase est une symphonie incroyable, une musique au-delà des mots employés. On voyage littéralement dans le temps et dans l’espace à la découverte du Grand œuvre ou autre Fama fraternitatis.
Ce bijou demande toutefois une préparation à l’inconnu. Ceux qui ne connaissent rien aux sociétés secrètes, à l’ésotérisme ou simplement à l’histoire se plongent avec plaisir dans un dictionnaire ou une encyclopédie pour en savoir plus. À l’inverse, ceux qui se sont intéressés à ces choses se retrouvent à s’interroger.

Petit exemple : le narrateur est invité dans une réception. Il entend dans la foule un homme dire à un autre « vous avez tort Balsamo ». Ce nom me disait quelque chose mais je n’arrivais pas à m’en souvenir. J’ai tourné en rond dans ma chambre pour finir par avoir la révélation un quart d’heure plus tard : Joseph Balsamo ! Comte de Cagliostro ! Me sont revenues en mémoire toutes les histoires le concernant, à commencer par celle du collier de Marie-Antoinette, du cardinal de Rohan et de Jeanne de la Motte. J’ai noté dans un coin et me suis plongé plus tard dans cette saga digne des plus grands romans.

Cette œuvre est incroyable mais ne vous y trompez pas ; il ne s’agit pas d’un énième roman dévoilant l’histoire secrète du monde. Nous avons ici un anti-manuel de la conspiration ésotérique où ce malicieux Umberto Eco joue avec les codes et se moque des théories du complot. Dans un passage savoureux, le narrateur explique qu’il est intéressant de voir que tel ou tel signe prouve l’existence de plans occultes. Son interlocuteur prend un kiosque à journaux en exemple. Il lui dit que ce kiosque fait telle taille, que si on mixe avec telle variable, que l’on prend en compte un autre élément et qu’on multiplie par le nombre d’or, on obtient la distance exacte entre la Terre et la Lune. La démonstration est imparable. Mais l’esprit brillant ayant fait ce calcul conclut en disant : doit-on voir dans ceci une conspiration des vendeurs de journaux pour conquérir le monde ?

Pour terminer, j’ai envie de faire un lien avec le sujet précédent au Café des Liches (coucou ma Vp Loose). Alan Moore parle dans cette vidéo des conspirationistes et de ceux qui l’ont approché pour illustrer des histoires sur l’assassinat de Kennedy, les illuminatis ou autres complots judéo-maçonniques.

J’aime sa réponse. J’aime qu’un auteur nous incite à penser.
Pour briser les dernières réticences : avez-vous le film « Le nom de la rose » ? Et bien il est tiré d’un autre Roman d’Umberto Eco. Si vous avez aimé cette histoire, alors sans coup férir vous adorerez celle-ci.

Bonne lecture.

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